Première Guerre mondiale

Première Guerre mondiale

Nous vous proposons différentes ressources pour le programme d'histoire en classe de 1ère générale et de 1ère technologique concernant ce thème. Vous trouverez en particulier un état des lieux de la recherche sur les questions relatives à la place de Compiègne et des relations entre civils et militaires durant la Grande Guerre (occupation allemande à l’été 1914, bombardements, privations, évacuation des civils), accompagnés de documents d’archives.

- Un point sur les programmes

- Etat de la recherche dans notre département (ouvrages et liens sélectionnés par Vincent Reig, historien local) :

  • Jean-Yves Bonnard (sous la dir.), 1914-1918 l’Oise au cœur de la Grande Guerre, Beauvais, 2008, 237 p.
  • 1914-1918, l'Oise dans la Grande Guerre, actes du colloque de Noyon des 24 et 25 octobre 2008, Beauvais, 2011, 255 p.
  • Ouvrage collectif, Compiègne, images de la Grande Guerre, Compiègne, 2018.
  • Entrer en guerre 1914- 1918 dans l’Oise, actes du colloque de Senlis des 20 et 21 septembre 2014, 183 p.
  • 1915-1917, l’Oise en guerre, actes du colloque de Clermont, des 30 septembre et 1er octobre 2016.
  • Ressources de CANOPE Oise (importantes ressources sur le conflit dans le département)
  • Annales Historiques Compiégnoises, n°27, n°33-34, n°47-48, n°53-54, n°75-76, n° 81-82, n° 91-92, n° 105-106, n° 119-120, n° 127-128, n° 135-136, n° 145-146.

- Documents pédagogiques :

Le récit d’après-guerre du Baron de Maricourt peint une situation dramatique des déplacements de foule traversant le département de l’Oise pour mieux fuir l’avancée allemande venue de France septentrionale : « Sur la route de Dunkerque à Paris par Amiens, l’exode des populations du Nord s’accéléra dès le 28 aout par Saint-Just et Clermont. Le récit des atrocités allemandes, commises en Belgique, semait une terreur si grande que le 30 aout les routes de l’Oise offraient un spectacle à la Callot, celui d’un lamentable cortège de misèreIl y avait dans ces caravanes quelque chose de hâve, de terreux, il y avait au fond des yeux une angoisse spéciale qu'aucun peintre ne saura jamais rendre, qu'aucun écrivain ne saura jamais décrire avec un assez terrible relief » (A. DE MARICOURT, L’Oise dévastée, Paris, 1920). De cet épisode on retient l’effondrement des plans d’opérations militaires en France puis du côté allemand. En effet, les forces françaises étaient supposées, à travers le plan XVII, déferler sur l’Alsace-Lorraine et repousser ainsi les troupes allemandes dans leurs territoires. Cette stratégie était donc fondée sur l’offensive à outrance, sur le modèle et l’élan napoléonien. A partir du 7 aout, les Français attaquent vers l’Est, puis dans les Ardennes. Dans ce que l’on appelle « la bataille des frontières », qui consistent à des attaques fulgurantes et répétées de corps d’armée bien définis face à des troupes ennemies elles-mêmes bien circonscrites, le plan français échoue avec d’effroyables pertes. Lorsque les forces allemandes pénètrent en Belgique, le commandement français sous-évalue fortement la puissance de l’aile droite allemande. Négligeant l’artillerie lourde allemande comme l’efficacité de corps de réserve placée en première ligne, le général Joffre pense à tort que l’étirement des lignes adverses va lui permettre de répéter la stratégie de Napoléon en frappant au centre pour couper l’ennemi en deux. Le bilan de cette première phase du conflit qui dure jusqu’à fin aout est un véritable désastre pour l’armée française. Durant la Première Guerre mondiale, la seule journée « oubliée » du 22 aout 1914 compte pas moins de 27 000 français tués, évènement comparable en pertes humaines au 1er juillet 1916 lorsque les troupes britanniques s’élancèrent au combat entre Vimy et Bapaume dans la Somme.

A cet été 1914, les armées françaises comme le Corps expéditionnaire britannique (British Expeditionary Force ou BEF) ne peuvent que ralentir la progression des troupes d’invasion, d’abord sur la Sambre (bataille de Charleroi), puis au Cateau et à Guise. Le haut commandement germanique avec à sa tête le général prussien Moltke succédant à von Schlieffen modifie un plan d’action devenu difficilement réalisable. En effet les troupes de l’aile droite allemande, épuisées par les vingt-cinq à trente kilomètres par jour dans une chaleur accablante de cette fin d’été, ne peuvent envelopper Paris par l’ouest comme prévu et oblique donc sur la gauche, à la poursuite de ce que l’Etat-major germanique pensait être les forces française et britannique en déroute. Dès ce premier mois de guerre, ce déferlement des forces ennemies prenant la direction de la capitale de part et d’autre de l’Oise place très vite notre département, pourtant relativement éloigné des frontières, aux avant-postes du combat. La victoire de la deuxième armée allemande menée par von Bülow à Saint-Quentin, suivie du changement stratégique de Moltke, amène la 1ère armée de von Kluck à se diriger vers l’Est avec pour objectif la traversée de l’Oise entre Noyon et Compiègne. Ce mouvement est amorcé dès le 29 août à travers le département de la Somme, puis à partir du 30 août ce sont huit colonnes allemandes qui envahissent l’Oise entre Guiscard et Breteuil. Dans le même temps, la retraite des français et anglais se poursuit : au 26 août, l’état-major du maréchal britannique French quitte la ville de Saint-Quentin pour rejoindre Noyon. Mais dès le lendemain, le mouvement se poursuit et l’état-major anglais entre dans Compiègne. Le quartier général de French prend rapidement ses quartiers dans le palais de la cité impériale. L’événement suscite à la fois admiration et inquiétude pour la population. Après l’installation des câbles téléphoniques et autres fils électriques, c’est toute l’aile gauche du Château qui est aménagé d’urgence tandis que le collège voisin est rapidement vidé de tout son matériel chirurgical d’hôpital provisoire pour pouvoir cantonner les troupes de l’Etat-major. Le Maréchal French et le général Joffre se rencontrent au Palais pour faire un point de situation tout en décidant de replier la 4ème  division anglaise au sud de l’Aisne, sur une ligne Compiègne-Soissons. La tension règne en ville : les nouvelles rumeurs annoncent que des combats se tiennent sur Péronne et que l’ennemi est proche. Des premiers postes d’observation militaires sont mis en place sur les hauteurs de la ville avec désormais la crainte d’une attaque brusque et rapide de la part des troupes allemandes.

Les craintes s’accentuent lorsque les avant-gardes allemandes atteignent les communes du nord du département, à commencer par la ville de Noyon qui tombe entre les mains ennemies le 29 août. La cité impériale n’a que de faibles moyens militaires pour opposer une quelconque et sérieuse résistance face à l’armée allemande. Les plans de la retraite organisée du général Foch ne laissent aucune place stratégique à la place de Compiègne, à l’exception de son massif forestier dont l’épaisseur était censée ralentir  la progression des allemands. Ce départ précipité tient à la progression rapide des troupes allemandes qui obligent également les anglais et l’état-major du maréchal French à quitter la ville. De Reims à Compiègne, tous les ponts de l’Aisne, de l’Ailette et de la Vesle sont alors dynamités sans pour autant ralentir cette ruée allemande. Dans la journée du 31 août 1914, le lieutenant Lechère du 13ème territorial fait sauter le pont du chemin de fer sur l’Oise à Compiègne. Les dernières troupes britanniques présentes ont pour mission de détruire le vieux pont de la ville, porte d’entrée sur le rue Solferino vers 11 heures. La mesure est assez mal accueillie par une partie de la population dont la crainte est de voir une riposte allemande ainsi que des dégâts liés à la déflagration. Les premiers cavaliers allemands entrent dans la cité impériale en cette fin de journée.

Ce temps de l’invasion puis de l’occupation allemande sur la cité impériale n’aura duré qu’à peine 13 jours en ce début du conflit mondial. Néanmoins l’évènement est devenu très tôt un enjeu de mémoire local.

Les compiégnois doivent rapidement vivre sous le rythme des ordres allemands. Les conditions de vie deviennent difficiles: c’est surtout la crise alimentaire qui préoccupe. Les allemands sont prioritaires et le pain leur est réservé. Les habitants sont aussi soumis à des contributions de guerres sous de multiples formes. Symbole de la domination allemande, les premières réquisitions sont exigées par les commandants d’étapes. Au 1er septembre à l’hôtel de ville, les autorités allemandes imposent une livraison de 15 tonnes de viande fraîche, 1.000 kg de viande fumée, 8.000 pains de 1 kg 500, 1.500 kg d’avoine, 6 tonnes de légumes verts, 40 quintaux de sel, 1 tonne de café brûlé et 400 quintaux de farine. Elle réclame en outre une contribution de 5.000 francs accompagnés de paquets de cigares, de tabac et de chocolat. Enfin, sous peine d’une amende de 500.000 francs or et sous astreinte forfaitaire de 100.000 francs or par jour de retard, la commune doit verser sous huit jours 12.000 chemises, 8.000 paires de chaussures, 6.000 mouchoirs, 10.000 paires de chaussettes, 8.000 caleçons et 500 paires de bretelles. A ces effets s’ajoutent 30.000 fers à cheval et 5.000 litres de vin. L’ampleur de ces réquisitions ne permet pas à la municipalité de rassembler toutes ces demandes. Le rituel est néanmoins tout aussi symbolique pour l’autorité allemande puisque le 3 septembre l’adjoint au maire, le baron Henri de Seroux, est chargé de verser ces indemnités de guerre dans la salle des Colonnes du Palais où l’attend l’Intendant général de la Ière armée.

 

Pendant cette phase de guerre de mouvements et tandis que les combats s’éloignent du département, l’Oise conserve sa fonction de lieu de transit pour les troupes allemandes. A mesure de l’avancée de la Ière armée, Von Kluck quitte la ville de Noyon pour installer temporairement le siège de son quartier général dans la cité impériale du 2 au 3 septembre. La veille des officiers supérieurs allemands avaient déjà pris position dans le Palais sous la conduite du conservateur Mourey. Comme avec les anglais seulement quelques jours auparavant, l’installation des forces allemandes se traduit par la pose de la télégraphie dans la cour et la réquisition des salles. Les grands appartements sont uniquement attribués à l’état-major, tandis que le général Von Kluck loge dans la villa de M. de la Tullaye située rue d’Alger (actuellement rue Fournier Sarlovèze), quasi face au château.

Certaines villes de l’Oise, à l’instar de Noyon, Clermont et Compiègne sont alors placées sous l’autorité militaire d’un commandant allemand et élevées au rang de « ville d’étape », dont l’hôtel de ville et la salle des séances du conseil municipal deviennent le siège de Kommandanturs. Néanmoins, si l’occupant affirme son autorité, il laisse également en place les autorités et notables locaux sous leur contrôle. La continuité est ainsi déclarée et permet surtout au pouvoir allemand d’assurer à ses hommes sa subsistance et approvisionnement nécessaire.

Le 4 septembre 1914, le commandant d’étape Sabath, successeur du capitaine Schroeder nommé à titre provisoire trois jours plus tôt, précise les conditions de l’occupation et les menaces de représailles pesant sur les compiégnois au cas où un acte malveillant se produirait. Le Hauptman Sabath qui a selon rumeurs les fonctions de gros marchands de salaisons à Hambourg ou Francfort ne parle pas le français et occupe le château ainsi que l’hôtel de la Cloche jouxtant les bâtiments municipaux. Quant aux autres officiers supérieurs allemands, ces derniers logent à l’hôtel du Rond-Royal. Enfin à l’exception du détachement du 52ème d’infanterie qui loge dans le corps de garde, le Palais n’est occupé que par le service du télégraphe.

 

Né le 24 juillet 1876, à Cholet, Félix Marie Braud est employé de banque au Crédit de l'Ouest, Ancien militaire, il est âgé de 38 ans lorsque la guerre éclate, Félix est alors mobilisé en tant que sergent vaguemestre au 1er bataillon du 72e régiment territorial d'infanterie. Son travail consiste en la réception, le tri et la distribution du courrier et des colis. Même s'il ne combat pas dans les tranchées, il est néanmoins en contact permanent avec le danger : obus, attaques aériennes, gazage, embuscades.

Félix Braud rédige son journal de guerre sur 11 petits carnets (14x9 cm), de 1914 à 1917. Son récit, entre le carnet de guerre et le journal intime, est pour lui, une parenthèse et un moment de répit qui lui permet de prendre du recul, de noter ses réflexions, ses interrogations et de mettre des mots sur ce qu'il vit. N'étant pas en première ligne, il sait finalement peu de choses sur les opérations militaires, mais très observateur, il commente régulièrement les mouvements des bataillons. Il suit les évènements à distance, entendant la canonnade au loin et supposant telles ou telles attaques, menées ou subies.

A la fin de la guerre, Félix devient payeur aux Armées et est mis en congé illimité de démobilisation le 2 février 1919. Il rentre à Cholet, retrouve sa famille et reprend son poste d'employé de banque au Crédit de l'Ouest. Il obtient la croix de guerre avec étoile de bronze, la médaille de Verdun, la médaille Interalliée et la médaille de la Victoire. Il meurt dans sa ville natale le 30 juillet 1951.

Cet extrait de carnet décrit au 17 mars 1917 un zeppelin allemand abattu au-dessus de Compiègne par les canons anti-aériens. En effet, dans la nuit du 16 au 17 mars 1917, trois dirigeables allemands lancent une douzaine de bombes dans le comté du Kent, au sud-est de l’Angleterre. Les trois aéronefs sont ensuite signalés au-dessus des villes du Havre, de Rouen et de Beauvais. Les batteries antiaériennes et une escadrille de la défense de Paris entrent en action à 4h20. Deux zeppelins parviennent à échapper au feu nourri mais le troisième, le dirigeable de marine L39, est pris à partie par le tir de la 2e section d’auto-canons de 75 de la 4e Armée dans le secteur d’Estrées-Saint-Denis. Probablement touché, le dirigeable, moteur arrêté, part à la dérive dans la direction de Compiègne. La section demi-fixe n°45 du lieutenant Gallibert de 3e Armée ouvre alors le feu et, à 5h50, après plusieurs tirs d’obus traçants de 380, incendie le zeppelin à une altitude de 3500 mètres. Les hommes d’équipage lancent leurs bombes puis se jettent par-dessus bord. Quatre d’entre eux s’écrasent au sol, les deux autres survivent grâce à leur parachute et sont faits prisonniers. La presse nationale s’emparera de cet événement de guerre spectaculaire qui fera l’objet de nombreux reportages photographiques.

 

Pour les Allemands, qui pratiquaient des tirs avec des canons à longue portée, l’objectif des bombardements dépassait le seul critère militaire. La mise en danger de civils et la destruction de symboles français s’inscrivait dans une perspective de démoralisation et de terreur. Cette guerre psychologique devait démontrer la supériorité technologique allemande et produire un sentiment d’insécurité déstabilisateur dans la population civile.

La fixation d’un nouveau front dans l’Oise place de nombreuses communes du nord-est du département sous le feu de l’artillerie. L’utilisation de l’artillerie à longue portée provoque des dommages aux villes plus éloignées du front telles que Clermont ou Compiègne. Parmi les cibles de l’artillerie allemande, Compiègne fut la ville la plus touchée durant le conflit. Le premier obus de très gros calibre éclata en juin 1915, à 17h35, au Carandeau, à 800m au sud de Choisy-au-Bac en rive gauche de l’Aisne. Un quart d’heure plus tard, un second obus tomba dans le parc du château de Compiègne, ouvrant un entonnoir de 4 mètres de diamètre sur une profondeur d’1 mètre 80. Sans faire de victimes, ces tirs de réglage démontrèrent que les villes de l’arrière étaient à la portée de l’artillerie allemande. En riposte à ces tirs de longue distance, l’armée française envisagea la construction d’emplacements de contre-batterie. L’Artillerie Lourde sur Voie Ferrée (A.L.V.F.) établit alors des épis courbes notamment au Francport et à Thourotte, mais ces aménagements se trouvèrent hors de portée avec le repli ennemi en mars 1917.

Devenu le siège du Grand Quartier Général, Compiègne devint la cible de raids de nuits effectués par les gothas. Le premier bombardement se produisit le 16 février 1918 vers 18 heures 30 : une torpille de fort calibre fut lancée par un avion sur le palais et tomba au beau milieu de la rue d’Alger, à l’angle de la place du Château. Deux officiers furent tués et plusieurs autres blessés. Cinq maisons s’effondrèrent. La déflagration fit voler en éclats les vitreries et des fenêtres tandis que l’abside de l’église Saint-Jacques était fissurée.

Avec les dernières offensives de 1918 et le lancement de la Bataille de Picardie, le 21 mars, plusieurs centaines d’obus de pièces à longue portée, de torpilles et de bombes d’avions ou de zeppelins furent envoyées sur les principales villes du département, sur les nœuds de communications et sur les usines. Il s’agissait d’abord de réduire les possibilités de renforcement du front allié en détruisant les points de passage obligés, les réserves en matériels, les dépôts d’armement munitions,  les voies ferrées, les camps d’aviation. Il s‘agissait aussi d’accroître l’impact psychologique de l’offensive. Ville symbolique, Compiègne fut à nouveau une cible privilégiée de l’aviation allemande et la cité impériale connut un bombardement massif par l’artillerie lourde. Entre le 8 juin et le 21 septembre, pas moins de 4.000 obus furent lancés sur Compiègne détruisant 400 maisons et en endommageant mille autres.

 

Le Miroir est un hebdomadaire illustré français lancé en 1910 comme supplément du Petit Parisien, puis comme périodique autonome à partir de janvier 1912 et contenant essentiellement des photographies d'actualité. Il devient Le Miroir des sports en juillet 1920. Le Miroir s'inscrit dans le prolongement de plusieurs périodiques français faisant appel massivement à la photographie. En  l’année 1910, Le Miroir est d'abord un cahier spécial rubriqué à l'intérieur de l'édition du Petit Parisien illustré qui sort en fin de semaine au prix de 5 centimes de francs. Il ne devient journal « indépendant » qu'à partir du 28 janvier 1912.  Le Miroir se compose d'un mélange d'actualités mondaines, de pages spectacles, sportives, de feuilletons romanesques ; les illustrations dominantes sont des reproductions de photographies mais collaborent aussi de nombreux illustrateurs.

À compter du 8 août 1914, Le Miroir passe en régime reportage de guerre : moins de pages (pénurie du papier oblige), illustré seulement de photos pour 25 centimes. Il connut sa plus grande diffusion avec la Première Guerre mondiale, évènement auquel il se consacra exclusivement jusqu'à la fin du conflit. Favorisant alors la production de documents spécifiques et inédits, il devient le laboratoire d’un nouveau langage, s’engage sur le terrain du photojournalisme moderne, imité de plus ou moins loin par l’ensemble de la presse illustrée.

Né à Paris le 24 décembre 1894, Compiégnois à partir de 1903 et jusqu’à sa précoce disparition le 11 septembre 1917, Georges Guynemer devint une des grandes figures populaires des plus emblématiques de la ville impériale qui lui rendu de nombreux hommages dans l’après-guerre 1914-1918, en rebaptisant de son nom le Cours du bord de l’Oise et en lui dédiant un monument spécifique en 1923. Engagé volontaire à l’école d’aviation de Pau, ce Compiégnois d’adoption commence son apprentissage de pilote en février 1915 avant d’être versé dans l’escadrille des Cigognes. En vingt-sept mois de combats, le capitaine Guynemer totalise 755 heures de vol et 53 victoires, accumulant les citations et les décorations.

Si sa vie militaire fut finalement brève, le climat général de la Grande Guerre exigeait de distinguer quelques héros exemplaires : son courage, sa maîtrise de l’arme aérienne nouvelle, son patriotisme lui ont mérité d’être le premier, appelé l’As des As, et de devenir ainsi un symbole national de la victoire. La construction du mythe relève de plusieurs objectifs. Les offensives d’Artois et de Champagne ont été un échec : personne ne voit d’issue à ce conflit. La population française a donc besoin d’une belle histoire qui pourrait lui redonner espoir. En outre, il ne faut pas oublier que l’aéronautique n’en est qu’à ses balbutiements. Créée en 1912, elle est une arme neuve dont la gestion des crédits a été critiquée. Elle a besoin d’être légitimée pour se développer et d’un porte-drapeau capable de la représenter. L’armée française décide alors de mettre sur le devant de la scène un « héros » afin de provoquer une émulation populaire mais aussi de contrecarrer la propagande ennemie qui encense les victoires de ses propres pilotes. En février 1916, il est cité au communiqué après sa 5e victoire. L’armée abreuve alors en informations et photos les médias français et la presse alliée (Royaume-Uni, Japon, Brésil, etc.) qui s’emparent du sujet. L’alchimie fonctionne et la population suit au quotidien les succès de ce héros. Les poilus s’agglutinent autour de son avion dès qu’il se pose et ses apparitions en public à l’arrière déchainent les passions. Après sa disparition, le 11 septembre 1917 au-dessus de forêt d’Houthulst en Belgique, la France continuera d’utiliser son aura pour entretenir le moral du pays. 

 

L’ECPAD (Etablissement de communication et de production audiovisuelle de la défense) détient au total près de six mille photographies prises dans l’Oise par des opérateurs de la Section photographique de l’armée. Ce nombre inclus également des images prises par des soldats dont les photographies ont été reversées à l’ECPAD via une procédure de don. De 1915 à 1919, plusieurs milliers de documents photographiques sont ainsi réalisés dans le département de l’Oise. Année après année, les opérateurs de la SPA suivent les innombrables destructions engendrées par la guerre, notamment lors de la retraite des forces allemandes en mars 1917, qui ont profondément marqué le sol et l’histoire du département.

Au regard des évènements passés de 1914, les autorités civiles et militaires françaises envisagent les conséquences sur la population d’une nouvelle offensive allemande sur le front de l’Oise. On travaille alors à la reconnaissance des abris envisagés et à la mise en place de structures adaptées.

Lorsque les Allemands déclenchent leur offensive de printemps, le 21 mars 1918, les habitants du nord-est du département peuvent être évacués trois jours plus tard par convois ferroviaires sur la commune de Crèvecœur-le-Grand où ils sont recensés, cantonnés dans des logements et nourris puis dirigés vers Rodez et Cahors. Les autorités civiles et militaires organisent le repli de la zone située au nord de la ligne Breteuil – Saint-Just-en-Chaussée – Estrées-Saint-Denis, soit 216 communes. Si l’évacuation des civils leur permettra de ne pas vivre une nouvelle occupation, elle exposera sans retenue leurs habitations aux bombardements français.

 

Produit de base de la nourriture, le pain a aussi une forte connotation symbolique dont la crainte de pénurie hante les esprits. C’est pourquoi les autorités de l’État et municipales prennent conjointement les dispositions nécessaires par un interventionnisme de plus en plus fort lors des deux dernières années du conflit. En octobre 1917, la carte de pain voit son apparition à Compiègne. La mairie reçoit ainsi un télégramme de la préfecture relatif à l’application du décret du 3 août 1 917 à propos de la réglementation de la consommation de pain. Ainsi chaque consommateur ou chef de ménage est tenu de faire sur un carnet, une déclaration des quantités de pain correspondant à sa consommation et à celle des personnes vivant à son foyer. Les quantités de pain maxima pour la consommation hebdomadaire de chaque personne sont fixées d’après les bases suivantes : de 1 an à 6 ans une proportion de 300 grammes de pain par jour et à partir de 6 ans, 500 grammes de pain par jour. Sur chacune des feuilles du carnet sont mentionnées le nom du consommateur ou du chef de ménage, les noms, âge et profession de chacune des personnes vivant à son foyer. Le maire vérifiera la concordance des deux feuilles du carnet, s’assurera que les quantités portées sur chacune d’elles sont bien celles auxquelles a droit le consommateur. Il apposera le cachet de la mairie sur chaque feuille et vérifiera l’exactitude des mentions qui y sont portées. Les imprimés seront remis au public dans les locaux de la mairie à compter du lundi 29 octobre 1917. Le 30 décembre 1917, les restrictions se précisent encore. Le préfet de l’Oise commande aux maires de réduire immédiatement et dans des proportions importantes (de près de 20 %) la consommation de pain dans leurs communes. Ces politiques interventionnistes qui mêlent à la fois restrictions et rationnement sont globalement acceptées par la population et ne cause aucun émoi particulier sur le Compiégnois.